Grâce à la démocratisation des outils technologiques et à l’apparition des réseaux sociaux, les blogs féminins indépendants se multiplient au Chili, au grand dam des revues traditionnelles. Des rédactrices inspirées parlent, en solo ou en équipe, de mode, de cinéma et de musique de manière décontractée, « entre copines », et rencontrent un vif succès.
Paola Herrera est une jeune journaliste travaillant à la TVN, la télévision nationale chilienne. Maman et travailleuse, elle décide en janvier 2012 de parler de son expérience à travers un blog. Sa distraction favorite prend de l’ampleur quand elle décide de s’y consacrer sérieusement et de diversifier ses thèmes de prédilection. Son blog, aujourd’hui intitulé «Enfocadas» [dont on parle] est en plein épanouissement.
Lorsqu’on l’interroge sur la presse féminine et sur l’émergence des blogs dans son pays, elle explique qu’il « n’y a aucun doute que la presse féminine évolue. Cela fait des années que je consulte les sites espagnols féminins et j’ai bien vu qu’ils incorporaient progressivement des blogs, comme chez Glamour ou Elle par exemple. »
D’ailleurs, nous dit-elle, de plus en plus de blogs chiliens se portent très bien. « Les lectrices chiliennes sont plus réceptives à ce type de format. Même, les marques traditionnelles se sont rendu compte du potentiel du format blog, et ça c’est juste parfait pour nous!».
Avec presque 5000 followers sur Twitter au moment où nous écrivons ces lignes, Paola avoue que les réseaux sociaux y sont pour beaucoup dans le succès de son blog. Elle n’a pas encore commencé Google Analytics, « Erreur numéro 1 qu’aucun blogger ne devrait commettre, je sais ! ». Elle compte s’y mettre avec la version 2.1 de son blog. « Ce que je sais en revanche, c’est que je vais augmenter mon audience cette année, (…). Les réseaux sociaux apportent énormément en terme de pages vues à chaque publication de contenu ».
Ecris-le, toi !
Mais Paola n’est pas la seule chilienne à s’être lancée dans l’aventure. Zancada est un exemple de blog collectif, tenu par une équipe exclusivement féminine et d’horizons divers. Lancé en 2005 à l’initiative de la dessinatrice graphique Paty Leiva, le blog « l’enjambée » scande comme slogan : « Ce dont tu parles avec tes amies est dans Zancada, (et si ça n’y est pas, écris-le toi!) ».
L’équipe de collaboratrices du blog Zancada
Le ton est ici plus engagé, et vise à promouvoir la place de la femme dans la société chilienne. Beauté, environnement, art, santé, amour, voyages et technologie sont abordés selon leur « point de vue subjectif ».
« Leur » point de vue ? Oui, parce que Zancada cache une panoplie hétéroclite de collaboratrices. Elles sont dessinatrices, journalistes, artistes, licenciées en Lettres, productrices, ingénieures ou des métiers de la communication et écrivent pour Zancada quotidiennement. Et comme l’y invite leur slogan, la communauté de lectrices est invitée à participer pour parler de ce qu’il leur importe. Si l’on en croit leur page Facebook, 22 900 personnes les « aiment », ce qui fait une bonne réserve de collaborateurs potentiels.
“Lisez l’article qui vient de sortir #OutletCity dans #Zancada, le blog le plus lu au Chili !”
Nouveaux défis
Face à cette effervescence de créations de blogs de bonne qualité, les médias traditionnels ont dû s’adapter pour maintenir le cap. Paula est de ceux-là. Fondée en 1967, la revue est le leader national de son secteur selon une étude Ipsos de 2011, avec 35 000 exemplaires distribués tous les quinze jours. Les femmes de 15 à 50 ans, dont une plus forte majorité entre 24 et 36 ans, définissent le lectorat ciblé. Reconnue pour son attention accordée aux photos et au graphisme, la revue s’adresse aux femmes de catégories socio-professionnelles suppérieures.
Mais pour continuer de clamer son cœur identitaire « du contenu avec du visuel, du visuel avec du contenu » aux nouvelles générations, la marque Paula a dû lancer à son tour un site internet actif et régulièrement enrichi. Les rubriques gastronomie, beauté, lecture et sexe sont ainsi alimentées par des rédacteurs qui prônent « l’excellence journalistique ».
Car la valeur ajoutée de la marque reste sa rigueur et sa notoriété. Concours de beauté, marchés de la création et édition. Cuisine et Mode viennent compléter l’armurerie de la marque. Paula se définit comme ayant « une ligne éditoriale avant-gardiste, esthétique et inspirée, qui recueille avec pluralisme les divers courants sociaux culturels » de sa génération.
Alors pour mener à bien sa promesse, la revue est largement présente sur les réseaux sociaux tels que Facebook, Twitter et Instagram pour présenter aux Chiliennes les «défis d’une société en constante évolution».
Article rédigé par Marianne Deygout